Une puissante odeur d’ozone montait depuis l’humus détrempé des sous bois. Au loin, l’orage s’éloignait poussé par un fort vent d’Ouest. L’écho sourd et métallique du tonnerre résonnait encore, plus rare, mais encore. Alors que déjà, les éclaires avaient cessés… Dans certaines vieilles histoires, il est dit que les orages naissent des combats titanesques d’antiques dragons. Les éclaires surgissent de leurs écailles qui s’entrechoquent, et le tonnerre, gronde à leurs terribles rugissements.
La pluie s’était arrêtée aussi subitement qu’elle avait commencée, laissant derrière elle une brume humide et épaisse qui s’infiltrait partout. Les sous bois baignaient à présent dans un univers cotonneux à la lumière diffuse et quelque peu jaunâtre, et la nature, comme soumise à un charme, paraissait s’être endormie dans un profond silence. L’elfe, qui, avec patience, avait attendu que les tourments du ciel se passe, était adossé contre le tronc d’un tilleul vénérable. Ce dernier, en fleur, laissait planer un parfum délicieux qui se mariait fort bien avec les autres plantes des environs. Chèvrefeuille, bois de rose, menthe sauvage… Il inspira goulument cet air tout en écoutant le doux clapotis des gouttes qui, paresseusement, tombaient des feuilles des arbres. L’épaisseur des feuillages de ceux-ci n’eut cependant pas le pouvoir de le prévenir contre le déluge passé, il constata avec résignation que sa cape de voyage avait prise l’eau. La sensation froide des ses vêtements humides contre sa peau le fit frissonner et il se colla un peu plus contre l’arbre comme si le tilleul dégageait de la chaleur… Le silence avait quelque chose d’un peu inquiétant, les oiseaux avaient-ils senti la présence d’un prédateur ? Wido se concentra et laissa les impressions venir à lui… Pourtant non, aucune présence menaçante ne planait, ni aucune présence que celles de petits animaux et des plantes. Un soupir de contentement filtra au travers de ses lèvres. L’elfe enleva prestement sa cape lourde de l’eau absorbé et sa chemise imbibée, la fraicheur de l’air le mordit et il grimaça. Il essora la chemise de lin aussi bien qu’il pu et la laissa pendre sur la branche d’un jeune aulne à côté de la cape. Il commença dès lors une toilette de chat. Après avoir pris une grosse poigné de saponaire dans son sac de voyage, la plante émettant une mousse au léger parfum vert au contact de l’eau, il n’eut qu’à la frotter contre sa peau pour se laver et enfin utiliser un morceau de mousse végétale pour se rincer. Wido aimait être propre et cette toilette, bien que sommaire, lui était devenu indispensable, d’ailleurs son ancien tuteur Lyrth le lui avait inculqué en tant que moyen le plus sur de se prévenir des maladies…
Il en était là de ses réflexions et souvenirs quand une voix aigrelette interrompit le fil de ses pensées et de ses gestes.
« Alors mon garçon on se fait propre. »
Une minuscule grenouille verte et marron observait l’elfe depuis le haut d’une amanite. Elle était vraiment toute petite, à peine plus grosse que le pouce et ses yeux, comme deux billes aux pupilles carrées semblaient disproportionnés par rapport au reste de sa petite personne. Wido, via son aura, reconnu là un esprit de la forêt, ceux-ci pouvaient prendre n’importe quelle forme, même les plus fantasques, et pouvaient vous vouloir du bien comme du mal dans leurs perpétuelles espiègleries. Bien qu’il n’y avait pas de quoi se formaliser, il se sentit gêné d’être ainsi surpris dans sa toilette et c’est avec affliction qu’il sentit poindre un fard sur son visage qui se renfrogna quelque peu. Damoiselle grenouille quant à elle prit un certain plaisir à ce spectacle, ce qui pourrait être un sourire se peignit sur sa bouche animale.
« Auriez-vous besoin de quelque chose ? » demanda-t-il cependant avec respect, car il savait qu’il fallait toujours agir de la sorte avec un esprit, ceux-ci étant plutôt susceptibles de nature.
« Moui… Peut être bien. » , minauda-t-elle.
Wido qui depuis le début de l’intervention s’était tourné vers elle en se fiant à la direction de sa voix fit mine de lui tourner le dos ce qui eut l’effet escompter…
« Oh ne prend pas cet air mon cher ami, je viens de la part de l’Esprit Grand Duc, qui connaissait fort bien ton maître et te connais bien aussi. Nous les esprits on aime bien regarder qui vient dans nos forêts… Le Duc est un sage, annonça-t-elle d’un air solennel, Mais va savoir pourquoi il s’intéresse aussi au sort des peuples d’Erin. » , rajouta-t-elle avec une pointe de mépris. « Quoiqu’il en soit, il pense que tu dois t’impliquer dans la grande Quête, c’est un message qu’il ma chargé de te dire, et me voilà ! Crôa ! »
Il resta interdit, c’était très inattendu, et assez dérangeant. Ses aspirations pacifiques le portait à rester en dehors des mouvements de ce monde. Il ne se sentait pas l’âme d’un guerrier et tenait à une certaine tranquillité. Par ailleurs il ne voyait pas, si on puis dire, ce qu’il pourrait apporter avec son handicap. Son seul talent était celui de la médecine…
« Pourquoi l’Esprit Grand Duc n’est venu me faire par de ses conseils en personne ? »
« Plus tard mon grand… D’ailleurs on vient, je ne reste pas. Je te salue ! »
« Mais… Attends ! »
C’était déjà trop tard, la grenouille avait bondit dans les fourrés dans un bruit mat. Wido se sentit presque floué. Cela étant, il y avait un point sur lequel elle n’avait pas tort, une présence se profilait au travers de la brume. Sans attendre l’elfe attrapa sa chemise et l’enfila aussi vite que possible. Elle était encore humide et il émit un grognement sourd de désaprobation.
Accueil 
Connexion 
![Dans la brume [libre] Bouton10](https://i.servimg.com/u/f82/09/02/46/81/bouton10.jpg)